L'AFFAIRE RICHARD LABEVIERE, REDACTEUR EN CHEF
Le 8 juillet
2008, Richard Labévière, rédacteur en chef à Radio France
Internationale (RFI), expert des questions proche et moyen-orientales,
auteur de plusieurs ouvrages traduits dans plusieurs langues sur ces
questions, réalise à Damas une interview exclusive du président syrien
Bachar al-Assad avant son voyage à Paris, pour RFI et TV5-Monde – deux
filiales de la holding Audiovisuel extérieur de la France (AEF) : dans
n’importe quel organe d’information, cette réussite journalistique
serait saluée par la direction. À RFI, il en va tout autrement :
l’affaire se transforme en « faute grave », passible de licenciement.
Celui-ci, escorté d’un étonnant bouquet de fautes de procédures, est
signifié au journaliste par Alain de Pouzilhac, PDG de l'AEF, le lundi
11 août. Sans que le Conseil de discipline se soit prononcé.
Et
le dossier est vide, d’un vide abyssal. Il reproche à l’intervieweur de
n’avoir pas prévenu à temps sa hiérarchie – mais elle l’était (par
écrit) cinq jours avant l’interview. Il lui impute des
dysfonctionnements de production - mais les directions de RFI et
TV5-Monde en sont seules responsables. Et tout à l’avenant. Lorsqu’on
veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage. Serait-ce que le
journaliste n’est pas conforme à la doxa en vigueur ?
Cette
manière brutale et injustifiée, au mépris du droit, de se débarrasser
d’un journaliste qui déplaît, augure mal de la suite. L’affaire,
précipitamment bouclée au coeur du calme estival, va bien au-delà d’un
classique abus de pouvoir. Elle pourrait être emblématique de la
reprise en mains de l’Audiovisuel extérieur de la France sur les
contenus éditoriaux, comme du plan social à venir, dont chacun sait que
la première cible est RFI.
L'affaire Richard Labévière
s’inscrit dans l’orwellisation en cours de la presse française, la
remise en cause du pluralisme journalistique et de la liberté
d’expression au pays des Lumières. Avec, pour horizon, la volonté
d’imposer une lecture unique, néo-conservatrice et inconditionnellement
pro-israélienne des crises et des relations internationales.
Soutenir
ce journaliste irréprochable, qui assigne en justice la chaîne publique
qui l'employait, c'est soutenir la presse libre dont tout citoyen a
besoin.
Vidéo : interview de Richard Labévière, journaliste licencié par RFI : http://www.dailymotion.com/cinesoumoud/video/x6honr_censures-francaises-richard-labevie_news